Sunday, August 23, 2009

Transition : Guerre psychologique entre une junte ambitieuse et une "opposition" indécise


Source : L'observateur Guinéen : Dernière Mise à jour : 22/08/2009 (Auteur : A.CONDÉ)

Des querelles mesquines divisent les acteurs de la transition au sujet de la tenue des élections en Guinée. Forces Vives et Bloc Patriotique veulent aller aux urnes en rang dispersé. Mais ils se livrent d'abord une guerre de muscles épique sans précédent. En face, une jeune junte réticente qui ne semble rien entendre en 2009.

A l'étranger, les bailleurs de fonds qui promettent les carottes et le bâton observent. Dans cette guerre psychologique entre une opposition hésitante et une junte ambitieuse, l'on ignore qui l'emportera ?

Avez- vous lu la fable de Jean de La Fontaine , intitulée le voleur et l'âne ? Tenez ! On vous la paraphrase autrement ! Pour un scrutin de tous les dangers, deux forces se battaient. L'une voulait l'écourter coûte que coûte, l'autre voulait le prolonger vaille que vaille. Et tandis que se lève une troisième force, armées jusqu'aux dents, qui refuse de rendre le pouvoir pour le bonheur du « Mouvement Dadis doit Rester.»

C'est approximativement ce qui est en train de se tramer en Guinée, à l'horizon. A l'allure où vont les choses ces derniers temps, nombreux sont les observateurs avertis qui estiment, à tort ou à raison, que la leçon de morale qu'on pourrait tirer de la précédente fable risque d'être le verdict final de la transition en cours en Guinée.

C'est en tout cas l'avis de bon nombre de guinéens qui ne comprennent pas la guéguerre qui oppose les principales composantes de la société guinéenne. Quand l'on voit d'un coté, les forces vives de la nation, un beau terme mais creux, puisque les acteurs politiques au lieu d'innover sont muets comme des carpes sur les véritables problèmes, estiment certains.

En vérité, les acteurs politiques actuels, essentiellement composés de jamais- gagnants, d'inconsolables dignitaires du précédent régime, de leaders émergeants et d'intrépides aventuriers friands d'exploits, pour reprendre l'expression d'un confrère qui force le respect, sont indécis, hésitants, inoffensifs, complaisants et peu bavards. Dribblés à maintes reprises par l'ancien stratège Conté, ils veulent aller aux urnes coûte que coûte en fin 2009. Ont- ils compris à présent, comme le dit la chanson, que premier gaou n'est pas gaou, mais c'est le second qui l'est ?

Leur tort aujourd'hui est leur précipitation d'aller vite aux urnes, sans aucune préparation. Le chronogramme de transition 2009 étant pratiquement caduc, ils tombent dans leur propre piège. L'on se demande d'ailleurs entre ceux qui l'ont proposé et l'autre qui a validé, à qui la faute ?

En face de ce groupe, il y a malheureusement le Bloc des Forces Patriotiques qui souhaite aller aux urnes en fin 2010. Cela s'appelle nager en contre- courant, mais il faudra faire avec. Composé d'anciens et de nouveaux partis, ce bloc, en quête d'électorat, sait bien qu'en allant aux urnes en fin 2009, c'est signer son suicide politique. Mais son tort, c'est quand il cherche à se rapprocher de la junte. Là, il commet une erreur fatale. Croire fermement à une junte sans avoir aucune garantie en retour, mais c'est de l'inexpérience politique.

Que ce soit les uns ou les autres, la vérité est que nos leaders manquent de vision et de courage politique. Au lieu de s'entendre sur l'essentiel, chacun s'est mis à jeter les peaux de banane sous le pied de l'autre. La preuve, tel ne voulant pas la tête de son adversaire aux prochaines élections réclame les audits comme sentence. Ce dernier, à sont tour, exige la limitation d'âge des présidentiables comme punition. C'est l'arroseur arrosé. Tous oublient que c'est le peuple qui élit.

Le combat est si rude que d'aucuns préfèreraient des militaires aux commandes qu'un civil au pouvoir. Dans ce jeu où chaque acteur veut l'élimination de son prochain, mais où est le patriotisme ? Qu'on cesse de divertir les gens, la vérité est qu'ils ne sont pas prêts à aller aux urnes.

Comme ces deux forces ne s'entendent pas, la junte laisse entrevoir d'autres velléités, du jour au lendemain. Beaucoup d'indices montrent à suffisance qu'elle a des ambitions inavouées. L'on a l'impression que seul le président Dadis veut aller aux élections en 2009. Comme pour dire que ses amis du CNDD n'ont pas dit leur dernier mot.

L'on se demande comment une junte qui a ouvert des chantiers gigantesques sur tous les fronts acceptera- t- elle de se retirer au pouvoir : projet Eau et Electricité, audits des 24 ans du régime Conté, procès des présumés narcotrafiquants et prédateurs de l'économie, évacuation des déchets toxiques, restructuration de l'armée, tournée continentale. Comment partir sans avoir posé des actes ou même fini son balayage ?

Entre des militaires ambitieux et des civils hésitants, la guerre psychologique fera rage et sans pitié, à mesure que l'on s'approche des prochaines élections. Tout se jouera dans la tête. Mais ce qui inquiète, ce que les différents adversaires disposent d'armes inégales. Comme entre le pot de fer et le pot de terre.

Il y a des raisons de s'inquiéter quand le commandant Moussa Keita dit qu'il ne sert à rien d'organiser des élections le lundi pour s'attendre à coup d'Etat le mardi. Cela devrait donner à réfléchir aux civils. Quand un général, ministre de la sécurité, n'est pas épargné, un civil doit s'attendre au pire. En vérité, il sera lavé proprement, pour ne pas utiliser le terme balayer qui est très impuissant.

BAH Abdoulaye

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